Bon sens alsacien contre postures d’élus
La réponse citoyenne à la question de l’avenir institutionnel de l’Alsace est indéfectiblement la même depuis l’annonce et la mise en place de la réforme territoriale et la fusion forcée avec la Lorraine et Champagne-Ardenne. Les Alsaciens veulent la sortie du Grand Est.
Dans une écrasante majorité, les Alsaciens rejettent un redécoupage régional dont rien ne parvient à démontrer un quelconque avantage. Au contraire, les seules difficultés — considérables — liées à la durée, au coût et à la complexité des déplacements pour des réunions d’élus ou des rencontres sportives à l’intérieur de cette région grande-comme-deux-fois-la-Belgique suffiraient par elles-mêmes à démontrer l’absurdité de cette technostructure. Parallèlement, le budget de communication inflationniste du Conseil régional démontre l’acharnement du président Rottner à effacer toute référence à l’Alsace et à fabriquer une identité grandestienne notamment en imposant dans l’espace public et mental son logo détestable.
Les 29 réunions publiques organisées par l’ICA confirment ce qu’expriment depuis bientôt 5 ans pétitions, manifestations et sondages. La dernière, ce vendredi 8 juin à Sélestat, a en outre bien fait ressortir le clivage entre les intervenants non élus, qui très majoritairement plaident pour la sortie du Grand Est, et les élus sur une ligne de quasi-consensus autour d’une collectivité à statut particulier, dans le Grand Est.
La frilosité des élus, pourtant censés représenter les intérêts et les attentes du peuple, peut s’expliquer par leur soumission à l’autorité du président de la République, lequel se déclare opposé à la remise en cause du périmètre de la méga-région. Il peut redouter que la sortie de l’Alsace ne crée un précédent et n’incite d’autres régions historiques à lui emboîter le pas. Mais à l’évidence l’Alsace est la seule région à se rebiffer, pour des raisons qui lui sont propres. Ces raisons, historiques, géographiques et culturelles, les autres régions les reconnaissent. Elles auraient dû être défendues dès le début de manière déterminée par l’ensemble des élus alsaciens, y compris à travers une démission collective. Les élus bretons et corses ont obtenu qu’on ne touche ni à la Bretagne ni à la Corse, qui comme l’Alsace ont une histoire différente du reste de la France.
En même temps que la question de la démocratie et du respect dû au peuple se pose celle de l’efficience de la gestion et de l’administration des territoires. Dans les deux cas, le maintien de l’Alsace dans ce grand ensemble étendu jusqu’aux portes de Paris est un contresens et devrait faire hurler. Alors se pose l’ultime question : à qui profite cette aberration ? À qui profite le crime ?
Parmi les réponses, apparaît bien sûr la figure du président de la technostructure dont le pouvoir et la notoriété sont en proportion et dont le plan de carrière personnel pâtirait d’un retour à une Région Alsace. Aux yeux des Alsaciens, il apparaît comme celui qui aura cherché à parachever la trahison de son prédécesseur, Philippe Richert.
L’État trouve sans doute son compte dans une péréquation horizontale des richesses, où la contribution alsacienne est conséquente. L’État compense ainsi sa démission progressive dans son rôle de répartiteur des richesses et dans l’organisation de la solidarité entre les territoires — tout en continuant à percevoir l’essentiel des impôts et taxes, auxquels l’Alsace contribue déjà de manière importante.
Une autre réponse relève de la petite géostratégie. En effet, placée au cœur de la méga-région, la Lorraine et tout particulièrement Nancy tirent brillamment leur épingle du jeu. Les nombreux transferts de sièges d’associations et de sociétés et des centres administratifs réalisés ou envisagés (Agence Régionale de Santé, Chambre régionale de Métiers et de l’Artisanat, Rectorat, Justice…) font de Nancy la vraie capitale du Grand Est. Strasbourg n’est de fait qu’un chef-lieu, de consolation. Sans doute le président du Grand Nancy, André Rossinot, use et usera de sa grande influence à haut niveau pour empêcher une sécession de l’Alsace qui réduirait sa propre aura et déplacerait le centre de gravité vers l’ouest — vers Bar-le-Duc ?
Unser Land refuse de voir l’Alsace sacrifiée à des intérêts personnels ou partisans. Comme nous y invitait Jean Rottner en 2014, avant d’en devenir le liquidateur zélé : Alsaciens, prenons notre destin en main !
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