Alsaciens, avec ou sans la France
Jean-Georges Trouillet, vice-président et porte-parole d’Unser Land
Andrée Munchenbach, présidente d’Unser Land, maire adjoint de Schiltigheim
Si elle est menée à son terme, la réforme territoriale voulue par M. Hollande, pourrait marquer une date tragique pour l’Alsace. La fusion des départements en un Conseil d’Alsace unique proposée au referendum le 7 avril 2013 devait consolider l’Alsace comme entité politique. A présent, si rien n’est fait, notre région risque purement et simplement de disparaitre. L’importance de l’enjeu et l’imminence du projet de réforme territoriale imposent que soit lancé le débat: les Alsaciens ne peuvent être mis devant le fait accompli !
Les questions institutionnelles seraient éloignées des préoccupations quotidiennes des citoyens ? A tort, car le contenu de notre assiette ou de notre compte en banque dépend en grande partie influencé par le contexte institutionnel et culturel. Comment expliquer autrement qu’en Alsace le taux de chômage en Alsace s’élève à 10% tandis qu’il est de 4% dans le Pays de Bade ou dans le canton de Bâle ?
L’avenir de nos institutions ne peut se décider dans les bureaux d’un ministère, ni être sacrifié aux intérêts personnels des barons investis par les partis parisiens. La duplicité de M. Buttner a fait échouer le projet de fusion des collectivités alsaciennes. Aujourd’hui c’est M. Richert qui semble prêt à sacrifier l’Alsace…
Celui qui se fait ver de terre ne doit pas s’étonner s’il se fait piétiner, disait Kant. Si nous voulons vraiment bâtir un meilleur avenir, il faut prendre du recul, faire preuve de clairvoyance et savoir se mobiliser au moment crucial. C’est ce qui a manqué au projet de collectivité territoriale unique. Malgré la large victoire du « oui » (57,7% des votants), les conditions – aussi draconiennes qu’inédites – nécessaires à sa validation n’ont pu être réunies. Comme nous l’avions clairement annoncé, ce projet nous aurait protégés de la menace de désintégration dans un « Grand Est ». Mais l’Alsace a laissé passer sa chance et le risque tant redouté est maintenant à notre porte. Désormais, il n’y a plus de place pour l’apathie, l’indifférence ou les discours ambivalents.
En effet, malgré tant de témoignages de loyauté et d’actes de soumission, lesquels ont souvent été autant de chèques en blanc sans contrepartie, l’Etat français dénie désormais aux Alsaciens le droit de posséder leurs propres institutions et de maîtriser ainsi leur destin.. Un affront qu’on n’imaginerait pas faire aux Corses, ni aux Bretons… En imposant une fusion avec la Lorraine, le président de la République s’apprête à rayer de la carte la Région Alsace, pourtant la seule avancée positive depuis que la France a rayé d’un trait le parlement et le statut d’autonomie acquis en 1911. Malgré le peu de compétences que l’Etat a bien voulu déléguer à la région, les Alsaciens y sont profondément attachés (84% selon un récent sondage).
La Lorraine est une région respectable mais incompatible avec l’Alsace sur le plan géographique, économique, culturel ou linguistique. Les difficultés rencontrées par les Mosellans pour faire ouvrir des classes bilingues ou faire appliquer le droit local donnent un avant-goût du sort qui serait réservé à l’Alsace si elle devait être annexée de force à cette région qui compte pas moins de 2,3 millions d’habitants.
Nul ne conteste l’impérieuse nécessité d’effectuer des économies. Mais la débâcle de l’Etat français est d’abord celle d’un Etat centralisé à outrance. Le centralisme coûte cher. Dans des pays fédéraux comme l’Allemagne ou la Suisse, les fonctionnaires représentent environ 10% de la population active emplois contre 20% en France, soit le double !
Réduire le millefeuille administratif est une urgence absolue. La suppression des départements annoncée par M. Hollande est une bonne nouvelle, mais cela reste insuffisant. La majeure partie de la fonction publique n’est pas employée dans les collectivités territoriales, mais dans l’appareil d’Etat, c’est-à-dire dans une multitude d’institutions qui détiennent le vrai pouvoir mais qui échappent à tout contrôle démocratique direct : ministères, administration centrale, préfectures, sous-préfectures, rectorat d’académie… Régionaliser l’appareil d’Etat, supprimer les doublons et réduire l’appareil central à l’exercice des fonctions régaliennes, voilà qui serait une réforme salutaire. Les gisements d’économies sont en effet dans une véritable fédéralisation et non dans une énième recentralisation.
Quant aux éventuels redécoupages territoriaux, ils doivent se fonder sur les réalités économiques, culturelles, géographiques et historiques, et non sur les vues déshumanisées et bureaucratiques de la DATAR. Nous plaidons pour des régions qui ont du sens, dans la réalité et le vécu : Alsace, Catalogne, Corse, Savoie, Pays-Basque, Bretagne avec Nantes comme capitale, Normandie réunifiée, Lorraine, Bourgogne, Franche-Comté, Occitanie… Ainsi sont organisés des pays fédéraux comme la Suisse ou l’Allemagne. L’Allemagne compte ainsi des Länder de taille aussi diverse que la Bavière, la Sarre ou la ville de Hambourg.
La France deviendra-t-elle un jour une république fédérale ? On peut en douter. Hier comme aujourd’hui, le pouvoir reste aux mains de l’Etat et de Paris, le reste de l’hexagone est encore qualifié de « province », du latin provincia, littéralement « territoire vaincu ». Il en est ainsi depuis les rois de France et M. Hollande ne remettra probablement pas en cause ce principe inscrit dans l’ADN de l’Etat français. La suppression annoncée de la clause de compétence générale pour les régions le prouve.
A court terme, nous devons nous mobiliser pour préserver l’intégrité de la région Alsace. Toutefois, si M. Hollande entend imposer, sans vote démocratique, une fusion dont les Alsaciens ne veulent pas, nous serons contraints de remettre en cause notre appartenance à ce pays, dont la contribution à notre épanouissement économique, démocratique et linguistique aura décidément été bien faible.
Former un Etat prospère, réconcilié avec son identité rhénane, ouvert vers l’Europe et le monde, vivant en harmonie avec ses voisins allemands, suisses, luxembourgeois et français… et si c’était là notre chance ? La question mérite d’être posée.
A l’heure où l’Ecosse et la Catalogne, deux grandes régions européennes, préparent leur référendum sur l’indépendance, le temps des Etats mastodontes, monolithiques et sclérosés, semble révolu. Ces entités, trop grosses pour être réactives et proches des citoyens, sont devenues trop petites à l’échelle d’une économie mondialisée. L’avenir est aux communautés à taille humaine, à l’Europe des régions et des peuples solidaires.
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